L'histoire de mon "Anatole"

Tout d'abord, je dois vous dire : 

Mon fils ne s'appelle pas Anatole, mais il ne serait pas content si je donnais son prénom..et même je crois que je ne lui parlerai pas tout de suite de ce blog...

Ce qu'il a vécu lui appartient, et d'ailleurs je ne sais pas vraiment comment il a vécu ces longues années d'école !

Je ne peux que témoigner de sa souffrance, de ses maux de ventre, de son mal être...

A ce propos :  à gauche, de ce texte, vous trouvez deux boutons :

-un pour écouter la chanson d'Anatole que ma fille m'a fait connaître et dont je suis tombée immédiatement amoureuse

-et un autre pour voir le clip en "grand"

Si vous n'en pouvez plus, vous pouvez arrêter la musique, et si vous voulez l'écouter en boucle...c'est vous qui décidez!!

 

Bon, je reviens à mon petit Anatole....

 

 

Anatole est né grâce a un petit miracle de la science : la fécondation in vitro..

Dans mon ventre...ils étaient trois..mais Anatole a du se dépêcher  pour venir au monde et il est arrivé au bout de 7 mois, parce qu'il savait que cela se passait mal "là dedans" et qu'il y  avait urgence..

Nous l'avons forcément accueilli dans la joie, mais aussi dans le chagrin d'avoir du faire le deuil de 2 autres bébés qui n'ont ps réussi à évoluer aussi vite....

Quand je suis rentrée à la maison avec mon petit miracle..il pesait plus de quatre kilos!!, et était en pleine santé..mais comme tous les prématurés, il mettait des heures à se nourrir, et collé contre moi, bien au chaud, il se nourrissait à tout heure de la journée...mais aussi de la nuit!

Je pense que cela a créé un lien très fort entre lui et moi..une sorte de "dépendance ", et aussi bien sûr un plaisir immense....

 

 

 

                                                 

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 Anatole a trois ans : 

 C'est un gamin vif et très à l'aise avec les adultes.. Il apprend vite, et il apprend surtout beaucoup en imitant ses deux sœurs qui sont de vraies petites mamans pour lui. Elles ont huit ans et dix ans, mais elles sont très attentives et ont inclus immédiatement Anatole à leurs jeux.

Comme je suis agricultrice, elle prennent en charge leur frère en rentrant de l'école, pendant que je suis à la traite des vaches. Et lorsque je rentre du travail mes petites fées ont fait leurs devoirs, mis en pyjama leur petit frère, préparé le repas..et souvent m'ont préparé un spectacle où leur frère a toujours un très grand rôle !

C'est le bonheur!!!Anatole est épanoui, seul petit bémol...il ne "fait pas " ses nuits...

Quand il était un petit bébé..il braillait des heures, affamé car il tétait très lentement et s'endormait souvent pendant la tétée.

Plus tard, vers un an, alors qu'il n'y avait plus ni biberon, ni allaitement, Anatole avait de grandes difficultés à s'endormir, et pouvait pleurer des heures dans son lit. Plusieurs fois dans la nuit, il criait et lorsque je venais le voir, je le trouvais arc-bouté, , (comme si quelque chose le brûlait dans le dos), énervé, et sanglotant, trempé de chaud.

La situation était si pénible que le papa d'Anatole est devenu sombre et qu'il supportait  mal la place qu'avait  pris ce petit garçon (son premier enfant..les filles sont nées d'un premier mariage).

Finalement nous avons du changer Anatole de chambre, nous avons déménagé au premier étage de la maison.

Fatiguée de me relever parfois toutes les heures, j'ai décidé de dormir dans la même chambre que lui...

Nous avons vu des médecins, des pédiatres,  des psychologues, des guérisseurs, des marabout en tout genre...rien n'y faisait!

Bien sûr , tous me conseillaient de le laisser pleurer jusqu'à ce que , à bout de force il s'endorme, mais j'avoue que chaque fois que je décidais de mettre cette solution en oeuvre, je calais avant la fin de la nuit ! 

Nous avons mis Anatole plus tard sous "médicament", mais malgré des doses affolantes (j'ai essayé un soir de prendre la même chose que lui, et j'ai été complètement dans le "brouillard" pendant deux jours), Anatole continuait de s'énerver, parfois même sans se réveiller.

Je me rappelle d'un magnétiseur que nous avions rencontré (j'ai épuisé toutes listes de mes amis pour trouver "La" personne qui pourrait nous aider), et qui m'a dit lors de notre premier entretien : cet enfant n'est pas complet...Il a essayé de travailler sur le fait qu'Anatole avait commencé sa vie , accompagné de deux autres bébés dans mon ventre. Il pensait que mon petit était en souffrance de cette séparation brutale qu'il avait subit à l'accouchement...

Au bout de plusieurs séances, aucune amélioration n'étant visible, j'ai abandonné.

Je suis aussi passé par les grigris sous l'oreiller, les huiles essentielles, les bains à la camomille, la relaxation (où je m'endormais très bien..mais pas Anatole), les massages, la mise en place de rituels, rien n'y faisait..

Et voilà.....dès qu'Anatole pleure, je le calme pour qu'il ne réveille pas toute la maisonnée...(ses sœurs dorment à proximité)

Je sais, au fond de moi que ce n'est pas bien, que je commets une erreur, mais je n'ai pas trouvé d'autre solution !

J'ai même fini par prendre Anatole dans mon lit, et lové contre moi, il passe une nuit à peu près correcte, se réveillant souvent, mais se rendormant très vite!

Tous les soirs, je couche donc Anatole, vers 20 h, je lui lit une histoire pour qu'il soit détendu et prêt à s'endormir, je reste avec lui jusqu'à ce que son souffle soit régulier, puis je quitte la chambre, et je m’occupe de ses sœurs, je fini mon travail, et je rejoins Anatole à la première crise vers 23 h...

Le matin, je me lève à 6 heures, et je vais à l'étable, traire mes vaches, donner à boire aux veaux, puis je reviens à la maison pour m’occuper des filles qui doivent aller à l'école, et enfin, je prépare Anatole pour qu'il puisse m’accompagner à nouveau à l'étable où je travaille encore une heure ou deux.

La journée, je travaille au bureau, je fais les comptes lorsque j'ai la chance que mon bambin fasse une petite sieste.

Je m'occuppe de la maison, et chaque fois que j'ai un rendez-vous, une réunion (je suis administratrice dans un service de remplacement pour agriculteurs), c'est accompagné de mon petit bout que je me déplace.

Le reste du temps, je joue avec lui, lui raconte des histoires....et Anatole adore cela.

D'ailleurs il se met à reconnaître des mots très rapidement dans ses livres d'enfant, et il reconnait : "il était une fois", ou le nom des héros.., les mots comme "arbre", "géant", "maman", chevalier" (qu'il différencie très bien de "cheval)......

 

                                                    

 

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Anatole a cinq  ans :

Il ne passe toujours pas ses nuits, souvent il se réveille, terrorisé par des cauchemars.

La journée, il devient peureux et obsédé par tout un tas de choses..un objet qu'il a perdu, et qu'il est persuadé d'avoir laissé sous le divan, et  qu'il faut absolument retrouvé, quitte à déménager toute la pièce...

Il a peur d'aller seul dans une pièce, aux toilettes..il a peur de la nuit.

Il est scolarisé dans une école à 8 km de notre exploitation et comme nous sommes isolés et à l'extérieur du village, je le conduis chaque matin à l'arrêt de bus où ses petits camarades attendent sagement et sereinement l'arrivée des transports.

Chaque fois, c'est un véritable tour de force pour le faire monter dans le bus...et pendant le trajet, Anatole est si turbulent et angoissé, que nous obtenons une accompagnatrice pour ne pas nuire à la sécurité des autres enfants.

Petit exemple avant l'accompagnatrice :

Je traîne Anatole jusqu'à l'intérieur du bus, je le force à s’asseoir, et à force de menaces, voire de fessées, il reste assis à sa place. Mais il colle son visage en larme contre la vitre du car en hurlant "non maman, je veux pas, je veux pas"...

Pendant le trajet, il se glisse sous le siège de la conductrice pour essayer d’attraper la pédale du frein..., fait des crises à perdre connaissance, vomit, et est totalement en panique.

Et là, je dis Merci à tous ceux qui ont "transportés" mon fils durant tout son cursus scolaire, pour leur patience, leur imagination et leur attention bienveillante , car je ne sais pas si vous pouvez imaginer mon désarroi, et mon chagrin quand chaque matin, il faut vivre ces crises de panique et de désespoir et s'en retourner à la maison le cœur et la tête vide. Ma seule consolation est que j'ai confié Anatole à des personnes formidables qui n'ont jamais porté aucun jugement négatif sur moi, et qui se sont même prises d'amitié pour ce petit monstre perturbateur!

Lorsque 'Anatole rentre pour déjeuner et repartir à l'école, aucun soucis...la dame qui conduit le bus et l'accompagnatrice sont devenues des amies, et viennent prendre leur repas à la maison. Ainsi, elles font partie de la famille et Anatole les suit relativement facilement pour la deuxième partie de la journée.

 

A la maison, Anatole est curieux de tout, il passe des heures devant l'ordinateur, les  mots  sont devenus ses amis...

En un an Anatole maîtrise la lecture, mais refuse de prendre un crayon , et ne s'intéresse pas au clavier. 

Il est intéressé par tout : la Mythologie (je choisis désormais les histoires du soir avant le coucher en fonction de ses centres d'intérêt du moment), la zoologie, (surtout les animaux marins dont il connait le nom en français et en latin)...

Il passe des heures aussi à créer des villages, des fermes, des paysages, dans notre salle à manger, transformant le papier de la crèche de Noël en montagnes, les papiers cadeaux selon leur couleurs et leurs matières deviennent des rivières, des prés..nous gardons tout ce qui peut être transformé en barrière, en arbre...

 

Mais revenons à l'école..

A l'école, mon gamin refuse quasiment toutes les activités lui imposant des contraintes, il a du mal à rester en place, et est si timide qu'il n'ouvre pas la bouche, même pour répondre à de simples questions. Il se contente de dessiner et d'attendre " l'heure des mamans".

Pour la fête de fin d'année, il ne participe pas non plus, sauf une fois!

Cette fois là, je vous la raconte, car c'est un moment incroyable, un souvenir délicieux, et étrange qui ne se reproduira plus durant toute sa scolarité.

Anatole ne veut pas faire parti du spectacle de sa classe. rien n'y fait, ni punition, ni menace., l'institutrice en perd son latin..pourtant  il s'agit d'un spectacle où les enfants imitent des animaux, et Anatole est bluffant à la maison quand il imite les animaux de la ferme..

La maîtresse abandonne, car elle ne peut pas perdre son temps à convaincre le petit, et elle a une charge de travail trop importante pour se concentrer sur ce problème. et puis, Anatole a sa réputation, il a déjà refusé l'année dernière!

Alors, ce sera comme chaque année, je regarderai le spectacle des petits camarades, avec mon rejeton sur les genoux...

Et bien non!

Je ne sais comment ils ont réussi à faire un petit miracle, et ce qui s''est passé dans la tête de mon gamin. Mais une assistante maternelle a réussi à convaincre Anatole de chanter une chanson sur le clown qui a un nez rouge (il adore cette chanson), tout seul après le spectacle sur les animaux.

Je ne suis pas au courant, et je commence à assister à la fête de l'école, comme toujours, le cœur à l'envers de voir mon gamin qui s'exclut tout seul de cette fête, et la frustration au ventre de ne pas pouvoir partager la joie et la fierté des autres parents. 

A un moment, l'assistante maternelle vient chercher discrètement Anatole, et il la suit gaiement !

Pendant que les petits copains finissent leur spectacle, Anatole et son accompagnatrice disparaissent de ma vue, derrière les coulisses, symbolisées par un drap tendu..

Après les applaudissements, il y a un petit silence et je vois Anatole entrer en scène. Il est tout rouge et sa démarche est maladroite, il est déguisé en clown, et je vois dans la lumière d'un projecteur mon petit bonhomme tout tremblant, la morve au nez, sa petite main tordant son immense pull, commencer à chanter d'une voix à peine audible sa chanson préférée.

Son pantalon trop grand tombe sur ses chevilles, mais la gentille assistante ne l'a pas lâché et, à genoux à coté de lui, elle maintient le vêtement, sous les rires du public , et mon chanteur en herbe imperturbable, continue sa prestation.

Cette fois j'ai le cœur à l'envers!!, Et je n'arrive même pas à filmer correctement cette scène merveilleuse, mais peu importe car le souvenir et l'émotion que j'ai ressenti à cet instant sont gravés à jamais dans ma mémoire.

A la fin de la chanson, Anatole se précipite dans mes bras, et me glisse à l'oreille : Pour toi!

Bien que j'ai cru à l'époque que nous avions franchi un grand pas, je n'ai jamais revu Anatole participer à une autre fête scolaire.

 

A la fin de ses trois années d'école maternelles, le divorce est consommé. L'institutrice ne supporte plus cet enfant étrange, elle émet un avis négatif pour son passage en CP. 

Anatole est né au mois de janvier, et donc il a un an d'avance (en raison du nombre d'enfants plus jeunes, il a été intégré à la moyenne section puis à la grande section avec des enfants qui avaient entre un mois et onze mois de différence avec lui).

Je pense que l'institutrice va me  proposer de le maintenir en grande section un an de plus, car elle parle de maturité non acquise, mais ce n'est pas le cas. 

Anatole ne peut pas rester dans le système scolaire, il n'a pas la maturité, il n'a pas le profil, il n'a pas l'attitude, il n'a pas la volonté..bref, il n'a rien qui va....il doit être pris en charge et être  avec des enfants comme lui qui sont en incapacité d’obéir à des ordres simples, de respecter des consignes simples, de s'intégrer à un groupe...

Ce discours de l'institutrice et de la directrice de l'école qui est présente à notre entretien, je le reçois comme une trahison. 

On ne me dit pas ce que je dois faire de mon fils, on me dit ce qu'on ne peut pas faire...

On ne me donne pas de solution précise, sauf celle de le faire suivre par un psychologue et de voir quelle institution pourra le mieux le prendre en charge.

On le marginalise à cinq ans

On le rejette.

On l'exclut.

Pourtant j'ai un argument et un argument de taille : Anatole sait lire, il est donc capable d'apprentissage!!!

Mais la réponse est sans appel..il est capable d'apprentissage, mais incapable de travailler dans un groupe, de suivre un rythme, de se concentrer, de mettre de la bonne volonté...

 

 

 

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Anatole à 6 ans :

Il entre au CP avec un an d'avance....

Pourquoi?

Parce qu'après l'entretien avec sa "gentille maîtresse" de grande section, je n'ai pas voulu "entendre " qu'Anatole était différent, si différent qu'il ne pouvait vivre avec les autres enfants, et espérer avoir une scolarité normale.

Et l'école m'a donné un sacré coup de main!!!

J'apprends au mois de juin que les enfants scolarisés en maternelle à B.. seront pris en charge par les écoles primaires de leurs secteurs...hors, nous dépendons de l'école de T...classe unique qui regroupe tous les enfants de notre village et des villages voisins. 

Hors, cette école qui n'a qu'une classe  regroupant tous les niveaux est en péril....elle est menacée de fermeture, car il n'y a plus assez d'enfants....

Anatole peut (c'est vraiment le comble) "faire la différence"!!!!!!

L'institutrice m'accorde un entretien et accepte bien volontiers d'inscrire mon fils à la rentrée, et comme elle n'a pas de section maternelle, il entrera donc au CP par obligation!

L'été sera placé sous le signe de la joie, et de l'espoir.

Je ne suis qu'au début d'un long, très long parcours du combattant, mais j'ai des forces, de la pugnacité, de l'imagination à revendre, et une confiance inaltéré en mon petit A.

La rentrée est difficile pour A, car il s'est très bien habitué à rester à la maison, alternant, jeux et "travail" à la ferme, ballades, et aventures fantastiques dans ces paysages qui envahissent désormais toute la salle à manger.

Mais je l'ai motivé. Je lui ai dit tout d'abord de ne pas écouter tous ces adultes qui lui disent que cette année sera difficile, (fini les jeux, bonjour les devoirs)(il faut écouter et être sage)(il faut travailler dur et ce n'est qu'un début)

*Voir dans l'onglet "comportement", l’imbécillité de ces propos!

Je lui dis au contraire combien c'est une aventure, qu'il va pouvoir utiliser ce qu'il va apprendre pour faire des recherches sur internet, qu'il va pouvoir écrire des histoires pour que d'autres les lisent..qu'il va apprendre des choses passionnantes....

 

A n'est pas très convaincu,  comme tous les enfants, il ne sait pas très bien ce que c'est "cette grande école" où il doit aller désormais

 

Une chose le rassure : nous habitons à cinq minutes de l'école, et c'est une cousine de son papa qui fera le taxi pour tous les enfants du village, donc plus de bus, plus de peur..il est en terrain connu.

Dès la première semaine, le ton est donné. l'institutrice souffre d'un cancer de la gorge, elle ne peut quasiment pas parler.

Quand je dis qu'elle souffre , c'est le terme exact : elle boit à grand peine quelques gorgées d'eau pour hydrater sa gorge brûlée par son traitement, ce qui provoque des "fausses routes", des étranglements...Elle a choisi d'exercer ces dernières années à la campagne, mais nous apprenons que son parcours a été difficile et qu'elle a été prié de se mettre "au vert"...d'où sa mutation dans une classe unique qui va disparaître, faute d'élèves..

Malheureusement son traitement lourd, et sa maladie la fatigue et elle n'est pas à même d'expliquer les leçons ou de prendre en charge le travail et l'organisation d'une classe.

Résultat : polycopiés pour les élèves qui savent lire (leçons/exercices/et corrections!!)

Chaque élève se débrouille au maximum, et le plus jeunes apprennent à lire chaque matin en groupe pendant environ une heure..et sont laissés ensuite sans activité le reste de la journée.

Les parents réagissent, pétitions, réunions..rien n'y fait!

Finalement, Anatole qui a besoin d'être très cadré, aime bien l'école où il passe la majeur partie de son temps à faire des dessins. comme il sait lire, il a peu de difficultés à suivre, mais alors que je m'inquiète de l'apprentissage de l'écriture, j'apprends, qu'apprendre à écrire, vient tout seul et qu'il n'y a pas besoin d'apprentissage particulier!!

A la maison, j'essaie tout de m^me d'apprendre les "lettres" et les "chiffres" à Anatole,mais il rechigne à faire des heures supplémentaires, et je me rends compte rapidement qu'il est très maladroit avec un crayon , et que ses dessins se font rare. Le pédiatre nous envoie chez une psychomotricienne qui détecte des troubles du tonus musculaires au niveau du poignet avec une raideur des poignets et une très grande fatigabilité de l'articulation lorsqu'Anatole s'essaie à écrire!!

Que faut-il faire? Rien!Des jeux d'adresse, du jonglage et de la patience....

A la fin du CP, Anatole connait son alphabet (appris en chantant à la maison, et écrit quelques lettres...Mais il passe dans la classe supérieure, car il lit très bien et il est ..très discret!

Discret et distrait : pas une fois il n'a' ramené (durant son année scolaire) correctement ses devoirs, ou ses livres..quand il ramène son sac d'école!

 

 

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Anatole de 7 à 8 ans :

Après son Cp, Anatole fait encore deux ans dans cette classe unique. Les résultats des enfants sont catastrophiques. comme nous ne sommes pas entendus par l'inspection, nous décidons de boycotter la rentrée, et d'inscrire nos enfants dans la ville la plus proche qui est à une dizaine de km. Nous votons , et parents de bons élèves ou d'élèves en difficulté, nous tombons tous d'accord : nos enfants prennent énormément de retard, font uniquement du Français et des mathématiques (très superficiellement). Pour ma part, avec l'accord de l'institutrice qui ne refuse pas un peu d'aide, j'interviens  durant ces deux années, à titre bénévole 2 après midi par semaine pour faire de la géographie et de l'histoire, de la musique et du sport...et préparer un spectacle de fin d'année...cette école est si triste et si silencieuse...J'y découvre avec effroi, une institutrice épuisée, sans patience (la maladie lui demande trop d'énergie), et sans organisation réelle.

Nous contactons la nouvelle école, qui accepte sans problème d'accueillir nos enfants...et nous avons le privilège d'être les seuls parents sur le territoire français à avoir fermé notre école alors que tant d'entre nous se battent pour maintenir les écoles de village!!C'est malheureusement la seule solution (très dure pour l'institutrice qui est prévenue, mais qui doit tout de même ouvrir son école à la rentrée, et qui nous en voudra tant). 

Elle décédera quelques mois plus tard, refusant de nous revoir, et surtout elle demandera que les "traitres " ne viennent pas assister à ses obsèques.

Anatole qui aimait bien son institutrice a très mal vécu cette période et n'a pas compris que nous le catapultions dans une nouvelle école, loin, avec, à la clé, l'obligation de prendre les transports scolaire!!!!Il est en CE2

 

 

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Anatole et sa nouvelle école

 

Nous avions eu l'assurance que nos enfants seraient accueillis, et suivis dans leurs difficulté dans la nouvelle école, au lieu de cela, personne n'a tenu compte des lacunes, du retard, et surtout du manque de méthode de nos enfants..

Les meilleurs s'en sont tirés à force de travail, les autres ont commencé un véritable "chemin de croix".

Anatole, qui a déjà des difficultés à la base a été jugé comme un fainéant, étourdi, trop en retard pour qu'on puisse lui venir en aide dans le cadre d'une classe normale...

Nous sommes désormais aux mains de psychologues scolaires, de psychomotricien (à l'autre bout du canton), ergothérapeute...et finalement le gamin n'est pas très souvent dans sa classe. il redouble en fin d'année, et fait une deuxième année de CE2, encore plus catastrophique que la première. 

Chaque jour, il faut se battre pour qu'il rejoigne ses camarades, il est non seulement démotivé, mais il a une image de lui totalement déformée (il dit toujours je suis nul, je comprends rien, je suis idiot).

Il perd totalement pied à la fin de son année, oubliant son sac d'école dans la classe, sur les marches de l'école dans le bus, et quand nous arrivons à le récupérer, il est souvent quasiment vide, les devoirs non notés, les livres manquent, les cahiers...Il ne copie aucune leçon (il est trop lent et n'arrive pas à écrire plus de deux lignes lisibles

Il est fâché avec l'orthographe, la conjugaison, la grammaire, le calcul, et est totalement isolé.

je me souviens de la réunions des parents en fin d'année, où l'institutrice me dit de ne pas rester, car elle va parler des évaluations et elle n'a pas évalué Anatole, "car c'est inutile tant son niveau de compétences est faible. 

Je quitte la salle sous le regard lourd des autres parents : mon enfant perturbe le rythme..mère indigne d'un enfant idiot, personne ne me soutiendra, car chacun a ses propres soucis..et puis que connaît-on de la souffrance d'un élève et de ses parents tant qu'on y est pas confronté...

j'ai tout de même "une bonne nouvelle, Anatole ne redoublera plus, on va le laisser "passer" dans la classe supérieure, il finira sa primaire en visiteur..on ne peut plus rien pour lui....

 

 

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Notre plan d'attaque !

 

D'accord, l'école ne peut rien pour lui, mais moi je peux, moi je veux, et je ne vais pas rester les bras croisés à regarder mon enfant souffrir et perdre toute confiance en lui....

 

 

Stratégies!!!!

 

Anatole est "malade" deux jours par semaine, et quand l'institutrice s'insurge, quand l'assistante sociale s'en mêle, je fournis un certificat médicale. j'ai parlé à notre médecin, il est d'accord!!

Pendant ces deux jours, nous reprenons tout ce qui est appris à l'école (mêmes horaires ; ce ne sont pas des vacances!!)

J'ai acheté en double les livres de classe, à défaut de réussir à inculquer à Anatole la manière de noter rapidement ses devoirs en fin de cours, et de ramener les bons cahiers et les bons manuels.

Bien sûre , ce n'est pas bien de soutenir son enfant et de le faire "manquer" la classe, mais je ne veux pas le déscolariser car il a besoin d'être sociabilisé, nous habitons dans une ferme isolée, et il n'y a pas d'enfant de son âge au village.

Alors je vais faire ma cuisine à moi, je n'emmène plus Anatole vers les spécialiste, car finalement, je crois bien le connaître et bien cerner ses difficultés!

 

Désormais il n'y a plus "d'école" pendant deux jours, nous n'avons plus d'exercices, de devoirs, de leçons..

Nous sommes des agents secrets, nous avons des missions, des codes à déchiffrer, des énigmes..

Nous sommes des aventuriers perdus en pleine jungle, nous devons retrouver notre route, tout est prétexte à apprendre mais sans souffrir, juste parce que l'on veut rester en vie, avancer, jouer, déjouer les pièges, sauver les animaux, les gens..

 

J'utilise le système de carte mentale , Anatole dessine ce qu’il doit apprendre avec juste quelque mots clés.

Les multiplications sont des codes secrets qui permettent de traverser une rivière..notre salle à manger devient le théâtre de nos jeux..avec une craie je dessine sur les joints des carrelage des troncs d'arbre qui passent au dessus de la rivière aux crocodiles...des péages où il faut donner la formule magique pour pouvoir avancer, des précipices où l'on ne doit pas tomber...

Et ça marche!!

Nous avalons en un temps record, multiplications, règles de grammaire, exceptions, géographie..calcul...

Seul soucis, le chemin de l'école est encore plus difficile, et Anatole ne répondant jamais aux questions, il accumulent toujours les zéros!

Pas grave, l'important c'est d'apprendre, d'avoir des méthode d'apprentissage, d'avancer...les notes ont s'en fou.

 

 

Suite et fin...

 

 

Anatole a suivi finalement un cursus scolaire "classique", il a eu son bepc..Bien sûr il n'a pas eu des notes formidables, mais il l'a eu..et j'ai  envoyé son diplôme à tous ceux qui ont pensé à un moment ou à un autre que notre démarche était vaine !

Nous avons continué jusqu'en 4 ème notre école à la maison , puis lorsqu'il a été apte à se débrouiller seul, je l'ai peu à peu laisser rejoindre sa classe tous les jours et je l'ai regardé grandir comme les autres enfants, avec ses différences, mais aussi avec ses compétence !

Après la troisième, il est entré en seconde professionnelle, car Anatole a de très nombreuses compétences : il est imbattable en Histoire de France..et de Navarre (il connait la mythologie grecque comme personne, et se passionne pour tout ce qui le fait rêver et ce qui fait travailler son imagination), il est capable aussi de donner des centaines d'indications sur les animaux marins, les écosystèmes, et est à la tête d'élevages impressionnants de lézards, de phasmes, de rats, poules...(nous avons ouverts une ferme pédagogique et il est un animateur passionnant quand il vient y travailler pendant ses vacances (c'est même un des rares lieux où il oublie complètement sa timidité!)

A la fin de sa seconde, il m'a confié être attiré par un métier : Anatole voulait devenir charpentier!!

Nous avons trouvé un maître de stage, et Anatole a passé avec succès son CAP de charpentier..mais comme désormais c'est un jeune adulte qui a confiance en lui et qui a de l'ambition, il s'est inscrit à un CAP zinguerie..son patron est content de lui (très content mais il ne faut pas se vanter!), et Anatole est heureux, heureux quand il va à l'école, heureux quand il est au travail..parce qu'il a trouvé sa voie, parce qu'il se sent respecté, utile, et qu'il a trouvé sa place dans notre Société.

C'est un jeune homme équilibré, humble et conciliant et surtout il est très tolérant.

Bien sûre, je crie toujours parce qu'il ne range pas ses affaires, parce qu'il est étourdi, parce qu'il ne ferme pas les lumières, ou perd sa carte de crédit..bien sûre, il n'est pas parfait , mais il est juste mon Anatole que j'aime et dont je suis fière!!

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